Rwanda: Lettre au ministre de la Justice concernant l'<<évaluation...
Human Rights Watch (French) - 4 hours ago
Human Rights Watch n'a jamais tenté de << blanchir [sanitise] et / ou
légitimer >> les FDLR et nous ...>> par le ministère de la Justice du
travail de Human Rights Watch sur le Rwanda , qui a d'abord été portée
à notre connaissance par un article publié dans The New Times le 2
juin 2014, avant de nous être ensuite transmise le 3 juin, à moi-même
et à notre chercheur sur le Rwanda, dans un document similaire pour
l'essentiel.
Human Rights Watch tient à exprimer sa profonde préoccupation au sujet
des déformations flagrantes de notre travail par le ministère, ainsi
que par les remarques désobligeantes et infondées contre notre
personnel, diffusées à la presse rwandaise. Cette lettre répond aux
allégations les plus graves, sollicite une rétractation de ces
accusations dénuées de tout fondement, et réaffirme notre engagement à
travailler de façon constructive avec le gouvernement rwandais.
Accusations de parti pris politique et de collaboration avec les FDLR
Human Rights Watch rejette catégoriquement toute accusation de
collaboration avec les Forces démocratiques de libération du Rwanda
(FDLR) ou de parti pris politique. Human Rights Watch n'a jamais tenté
de << blanchir [sanitise] et / ou légitimer >> les FDLR et nous n'avons
jamais été leur << porte-parole de campagne
>>. L'ensemble du travail de Human Rights Watch sur la région des
Grands Lacs, disponible publiquement, montre que ces allégations sont
dénuées de tout fondement.
Parmi les membres des FDLR figurent des individus ayant participé au
génocide au Rwanda en 1994, et d'autres qui ont commis et continuent
de commettre des violations atroces des droits humains dans l'est de
la République démocratique du Congo. Comme le gouvernement rwandais le
sait, Human Rights Watch a documenté et dénoncé les exactions des FDLR
dans des rapports et des communiqués de presse détaillés,[1]
appelé à plusieurs reprises à ce que les responsables soient traduits
en justice, et a témoigné devant les tribunaux au sujet de leurs
crimes.
Human Rights Watch travaille pour faire respecter les droits de tous
les Rwandais, tels qu'ils sont inscrits dans le droit rwandais et
international. Certains des cas que nous avons étudiés au Rwanda
récemment impliquent des personnes accusées d'être des membres ou des
collaborateurs des FDLR. Le fait que Human Rights Watch ait rendu
compte de leur détention illégale ou de leur disparition ne signifie
pas que nous soyons leurs partisans ni favorables à leurs points de
vue. Les gens ne perdent pas leurs droits humains fondamentaux, même
si leurs opinions sont odieuses ou s'ils sont des criminels, et Human
Rights Watch défend les droits humains universels de toute personne,
partout dans le monde.
Loin de se livrer à ce que le ministère de la Justice qualifie de <<
campagne de propagande délibérée, soutenue et politiquement motivée
contre le gouvernement du Rwanda >>, Human Rights Watch n'a pas de
motivation politique et ne fait pas de propagande contre le
gouvernement rwandais ni contre tout autre gouvernement. Notre rôle
est de mener des enquêtes et de dénoncer les violations des droits
humains, et de chercher des moyens légaux de mettre un terme à ces
violations, quelle que soit l'identité des responsables ou des
victimes.
Human Rights Watch travaille sur le Rwanda depuis plus de 20 ans et
nous avons documenté en détail le génocide de 1994 et les événements
qui y ont conduit, en particulier dans << Aucun témoin ne doit survivre
: Le génocide au Rwanda >>, un ouvrage de 800 pages publié
conjointement en 1999 par Human Rights Watch et la Fédération
internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH). Le personnel
de Human Rights Watch a également témoigné devant le Tribunal pénal
international pour le Rwanda sur les crimes commis pendant le
génocide.
[2]
Nous sommes donc sensibles au contexte des événements au Rwanda.
Toutefois, les droits humains que Human Rights Watch défend sont
universels. Nous avons la responsabilité d'appliquer la même
méthodologie et la même objectivité rigoureuses dans tous les pays où
nous travaillons, afin d'assurer équité, équilibre et cohérence.
Nous estimons que les allégations mal informées du ministère de la
Justice en ce qui concerne le présumé soutien des FDLR par Human
Rights Watch et notre supposée partialité politique sont à la fois
infondées et désobligeantes. Nous demandons donc au ministère de
retirer publiquement ces allégations.
Allégations désobligeantes à l'encontre du personnel de Human Rights Watch
Pour la même raison, nous réfutons les commentaires personnalisés et
désobligeants du ministère sur les chercheurs actuels et passés de
Human Rights Watch, et vous demandons de les retirer également. Nos
chercheurs travaillant dans et sur le Rwanda respectent les normes
exigeantes et la méthodologie de l'organisation. Nous nous portons
garants de leur travail et de leur intégrité personnelle, que les
commentaires du ministère ont mise en doute. Les tentatives visant à
personnaliser les désaccords entre Human Rights Watch et le
gouvernement rwandais de cette manière ne dissuaderont pas Human
Rights Watch de poursuivre son travail.
Informations inexactes
Nous tenons à attirer votre attention sur certaines inexactitudes et
des éléments factuels contenus dans les commentaires du ministère,
dans l'esprit de notre protocole d'entente.
En ce qui concerne les cas individuels de disparitions, de détentions
illégales et d'autres violations des droits humains, nous maintenons
les conclusions de nos recherches, et nous nous tenons à votre entière
disposition pour aborder avec vous personnellement toute question que
vous pourriez avoir à ce sujet.
L'<< évaluation >> du ministère dénature certaines de nos déclarations
sur l'affaire de Joël Mutabazi. Human Rights Watch n'a pas affirmé que
Mutabazi ait été torturé et contraint à avouer des crimes après son
retour forcé de l'Ouganda en octobre 2013. Les seules références à la
torture dans les publications de Human Rights Watch sur cette affaire
se rapportent à la période où Mutabazi se trouvait en détention
militaire au Rwanda en 2010. Cependant, nous avons exprimé des
préoccupations au sujet de son bien-être en novembre 2013, étant donné
le refus de la police rwandaise à ce stade de divulguer le lieu où il
se trouvait. Nous maintenons que l'enlèvement de Mutabazi et son
retour forcé de l'Ouganda au Rwanda étaient illégaux et constituaient
une violation grave des droits humains ; de fait, les autorités
ougandaises ont confirmé que l'enlèvement et le retour forcé n'avaient
pas respecté les procédures légales établies.
En ce qui concerne l'allégation du ministère selon laquelle des
membres des FDLR ont été invités à << informer immédiatement HRW s'ils
étaient soupçonnés et / ou arrêtés >> et qu'un commandant des FDLR a
fourni l'adresse électronique d'un membre du personnel de Human Rights
Watch, nous n'avons pas connaissance de cette information ni ne
disposons de confirmation indépendante. Cependant, il n'est pas rare
pour les groupes de toutes sortes - dont certains, comme les FDLR qui
se sont rendus responsables de nombreux crimes - de posséder des
coordonnées d'organisations internationales, et il est facile pour
quiconque de les obtenir. Le fait que certains membres des FDLR aient
pu avoir une adresse e-mail de Human Rights Watch ou demandé à leurs
membres de contacter notre organisation ne démontre pas un soutien de
celle-ci pour les FDLR, pas plus que si les membres des FDLR
possédaient les coordonnées de représentants du gouvernement ou d'une
organisation humanitaire, par exemple.
Enfin, en ce qui concerne l'allégation selon laquelle notre chercheur
a été << aidé et facilité par un certain Bahame Innocent >> lors
d'enquêtes sur des événements à Rubavu, aucun membre de notre
personnel n'a connaissance d'avoir rencontré quelqu'un de ce nom. Nous
vous serions reconnaissants si vous pouviez nous renseigner sur
l'identité de cette personne et la raison de l'association de son nom
avec le nôtre.
Respect par Human Rights Watch du protocole d'accord
Comme expliqué dans notre correspondance et lors de nos réunions
récentes avec votre ministère, nous estimons avoir respecté nos
engagements contenus dans le protocole d'accord, et avoir entrepris un
dialogue avec votre ministère en toute bonne foi. En effet, depuis de
nombreuses années, les chercheurs successifs de Human Rights Watch au
Rwanda ont toujours recherché le dialogue avec le ministère de la
Justice et d'autres représentants du gouvernement. Comme le ministère
l'a reconnu, notre chercheur vous a présenté des informations sur un
certain nombre d'affaires, à la fois par écrit et en personne, et a
cherché à obtenir votre réponse avant la publication des documents de
Human Rights Watch - en particulier récemment, au sujet des
disparitions décrites dans notre communiqué de presse du 16 mai. Nous
avons explicitement fait référence dans ce communiqué à vos réponses
ainsi qu'à celles d'autres autorités rwandaises.
Les communiqués de presse, de par leur nature, sont rédigés et publiés
dans des délais brefs, car ils répondent généralement à des situations
d'urgence, et il est donc inapproprié de les retarder pendant de
longues périodes dans l'attente d'une réponse. Les disparitions sont
particulièrement urgentes, étant donné que la vie et la sécurité des
personnes concernées peuvent être en danger.
L'objectif global de notre protocole d'accord est de << travailler
conjointement et solidairement afin de parvenir à une large protection
des droits humains au Rwanda>>. En dépit de nos désaccords récents,
nous respectons toujours l'esprit de cet accord et sommes sincèrement
engagés à travailler aux côtés du ministère de la Justice pour
protéger et promouvoir les droits humains au Rwanda.
Nous avons donc l'intention de maintenir un dialogue ouvert. Pour
notre part, nous restons attachés à partager les informations et
discuter des préoccupations de droits humains avec vous et d'autres
représentants du gouvernement rwandais.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de de ma haute
considération.
Daniel Bekele
Directeur exécutif, division Afrique
[1] Voir, par exemple, le rapport de Human Rights Watch << 'Vous serez
punis': Attaques contre les civils dans l'est du Congo >>,
http://www.hrw.org/fr/reports/2009/12/13/vous-serez-punis-0, et notre
dernier rapport, paru le 10 juin 2014, << République démocratique du
Congo : Mettre fin à l'impunité pour les violences sexuelles >>,
http://www.hrw.org/fr/news/2014/06/10/republique-democratique-du-congo-mettre-fin-limpunite-pour-les-violences-sexuelles.
[2] Pour marquer le 20ème anniversaire du génocide rwandais, Human
Rights Watch a publié un document d'information, << La justice après le
génocide : 20 ans plus tard >>,
http://www.hrw.org/fr/news/2014/03/28/rwanda-la-justice-apres-le-genocide-20-ans-plus-tard.
Pour consulter d'autres publications de Human Rights Watch relatives
au génocide rwandais, veuillez suivre le lien :
https://www.hrw.org/fr/news/2014/04/04/documents-relatifs-au-genocide
http://www.google.ca/gwt/x?gl=CA&hl=en-CA&u=http://www.hrw.org/fr/news/2014/06/12/rwanda-lettre-au-ministre-de-la-justice-concernant-l-evaluation-du-travail-de-human-&source=s&q=fdlr
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SIBOMANA Jean Bosco
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